Sylvestre
- Claude Lapierre-Poisson
- 30 avr.
- 6 min de lecture
Je commencerais bien ce conte par "il était une fois...", mais cette fois, c'est aujourd'hui, maintenant, hier, mais aussi demain. Cette fois est éternelle.
Je commencerai donc en te disant qu'il existe, tout près de toi, un univers magique et guérisseur, qui souhaite t'ouvrir ses portes et te porter jusqu'à sa découverte.
Cet univers enchanteur est tapissé de feuilles et de mousse, de vent qui ruisselle à travers les branches et qui berce les arbres. Il est là où les oiseaux et les animaux élisent domicile, là où le Soleil est roi du temps et la Lune reine des sentiments.
C'est un endroit où tu ne fais qu'un avec les cycles qui t'habitent et qui t'entourent, où tout s'enchaîne, avec une douce lenteur et un sens profond qui vibre en ton coeur. La magie et la réalité s'y rencontrent, s'entremêlant dans une danse enveloppante.
On pourrait croire que le silence y est maître, mais si tu tends l'oreille, tu entendras bien plus que des mots, que de la musique. Tu entendras battre le coeur de la Terre, au même rythme que le tien.
As-tu deviné de quel endroit il s'agit ?

Depuis la nuit des temps, la forêt abrite de curieuses petites créatures qui ne souhaitent être connues que de ceux qui en prendront soin et qui sauront préserver leur magie, leur environnement, ainsi que leurs secrets. Ces petits êtres se nomment : Les Sylvestres.
Ils viennent à toi aujourd'hui pour te transmettre un peu de leur sagesse afin que tu puisses, à ton tour, répandre ce précieux savoir autour de toi. Durant les prochains jours, ils se présenteront à toi, avec chacun une pépite de sagesse, pour faire fleurir ton coeur et t'aider à te reconnecter à ton essence profonde.
Les Sylvestres t'emmènent faire un doux voyage dans leur forêt, mais peut-être, après tout, que le plus beau voyage sera celui que tu feras à l'intérieur de toi-même.

À l’aube d’un jour de printemps, alors qu’il n’y avait ni arbre, ni fleurs, ni herbe, que de la terre, de l’eau et du froid, paru, pour la toute première fois, un petit bout de verdure, une feuille, qui perçait le sol boueux avec une immense douceur. Sous cette feuille, bien enfoui, se trouvait un petit Bulbe.
Lorsqu’il s’éveilla enfin et qu’il vit la lumière du jour, il regarda tout autour de lui et fut pris d’un immense vertige. Où était-il? Qui était-il? Il n’y avait, autour de lui, que de la terre, de la boue et un vent glacial qui soufflait. Et pourtant, malgré la peur en son ventre et le néant tout autour, il ressentait quelque chose éclore en lui : un espoir, une idée grandiose. Il n’arrivait pas à l’imaginer, il ne faisait que la ressentir.
Que peut-on attendre d’un si petit être sans jambe et sans parole? Et pourtant, ce petit Bulbe était, sans le savoir, le commencement de ce qui deviendrait une vaste forêt pleine de vie et de magie. Mais pour l’instant, il n’était pas grand-chose.
Chaque jour, il restait là, sans savoir pourquoi, mais en gardant toujours bien au chaud cet espoir au creux de son cœur.
Il grandissait peu à peu. D’autres jolies feuilles bien vertes se mirent à pousser au sommet de sa tête. Dans ce paysage si gris apparaissaient maintenant des couleurs porteuses d’espoir et de vie. Et puis, comme par enchantement, le Bulbe fit éclore une magnifique fleur, la toute première. Ce moment fut magnifique, et pourtant, le Bulbe se sentait faiblir. Il crut que tout espoir de voir ce monde fleurir était perdu à jamais. Et il finit par mourir.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là.
Lorsque le petit Bulbe mourut, la fleur sur sa tête tomba au sol et les graines qu’elle portait en son cœur se répandirent sur le sol. Chaque petite graine devint un bulbe à son tour. Et l’histoire se répéta, mais les Bulbes devinrent de plus en plus forts. Ils peuplèrent lentement ce monde qui devint une gigantesque forêt.
Aujourd’hui, les Bulbes sont immortels et ne font que se multiplier. Comme tes actions et tes rêves

Mais qu'est-il donc advenu de la Forêt, une fois que les Bulbes furent bien installés ?
Une forêt peuplée d'arbres, de plantes, de fleurs et de fruits reste tout de même sans vie si elle n'abrite aucun être à 2 ou 4 pattes.
Bien heureusement, il ne se passa pas beaucoup de temps avant que des animaux de toute espèce visitent curieusement les lieux. Et il n'en fallu pas plus pour les convaincre de s'y installer pour de bon.

Rappelons-nous qu'avant la Forêt, le monde n'était que terre boueuse et vent glacial. Les animaux, ayant passé des millénaires à survivre de misère, pouvaient maintenant s'abriter sous de géantes feuilles, se nourrir d'abondance et contribuer, par leur simple présence, au cycle éternel de l'endroit.
Les oiseaux trouvaient de tout pour faire un nid, les félins se prélassaient sur d'épais tapis de mousse. Les ours se régalaient de petits fruits trouvés ici et là et les chevaux raffolaient des herbes hautes.

Ces animaux furent appelés 《Alliés》, parce qu'ils deviendraient de véritables guides pour les Zhumains, leur rappelant leur véritable nature, car eux ne s'en éloignent jamais. Les Alliés te rappellent à ton essence profonde, tes besoins essentiels. Ils t'encouragent à te reconnecter à ton instinct et à toute cette nature qui t'entoure, car elle est guérisseuse et nourricière pour ta magie intérieure.

La Forêt était un lieu de paix, de magie, mais surtout d’abondance. L’abondance peut se voir de différentes façons : on peut la vivre dans la gratitude, lui donner en échange de recevoir, y trouver l’équilibre.
On peut aussi la sentir comme éphémère, fragile et comme on y voit notre propre survie, on s’y accroche un peu trop fort et on la veut pour nous seul…
Voyant la Forêt comme exploitable et n’en ayant jamais assez, des esprits ravageurs vinrent s’en prendre à elle en choisissant de la contrôler plutôt que de vivre dans son cycle naturel. Alors qu’ils auraient pu l’aider en lui permettant de s’épanouir et d’éclore, ils se mirent à diviser les ressources, le bois, l’eau, la terre, et entrèrent en guerre les uns contre les autres afin de déterminer qui serait le chef, qui auraient droit aux ressources et qui devraient travailler trop fort pour en récolter des miettes. Ils dessinèrent des lignes dans le sol qui désigneraient le territoire de chacun.
Ils se mirent à contrôler l’accès à la nourriture, à la connaissance et à la guérison.
Ils mirent les animaux en cage pour en tirer le maximum de chacun.
Et la Forêt se fanait de jour en jour.
Lorsque les esprits ravageurs se rendirent compte que leur terre mère se mourrait lentement, ils redoublèrent d’efforts pour tirer un maximum de chaque parcelle de l’endroit. Sans se rendre compte que si la Forêt s’éteignait, ils s’éteindraient bien avant elle.
C’est alors qu’un jour, sans bruit, mais dans une vibration majestueuse qui fit trembler la Forêt tout entière, surgirent du sol de curieux petits êtres, muets, mais capables d’entendre un bourgeon éclore : la Tribu des Pousses.
Dotés d’un courage exemplaire, mais d’une sagesse et d’un calme inébranlable, ils se mirent à envelopper chaque plante, chaque arbre, chaque fleur et chaque fruit d’une bulle dorée qui les protégeraient des agressions extérieures. Ils délivrèrent les animaux, leur redonnant leur liberté et leur nature. Et tout ça, sans jamais s’attaquer aux ravageurs.
Ceux-ci étant déjà affaiblis par leur folie et n’ayant plus rien pour se nourrir, finirent par faner et retournèrent poussière à la terre. Cette poussière se transforma en magnifiques petits bulbes qui ne tarderaient pas à éclore…

L’harmonie régnait à nouveau dans la Forêt. Un vent de liberté soufflait à travers les arbres. Il faisait bon y vivre. Mais plus les jours passaient et plus il sembla à la Tribu des Pousses que le cycle éternel tournait trop rondement.
Le soleil brillait soudainement trop fort, la lumière était trop vive et les couleurs trop vibrantes. La nuit ne venait plus, l’hiver non plus. La Forêt était captive d’un été trop chaud qui n’en finissait plus. Et les répercussions sur son environnement se faisaient ressentir de plus en plus.
Mais comme la nature est bien faite et qu’elle n’oublie rien, elle décida de transformer les restants de poussière des esprits ravageurs en quelque chose de merveilleux qui viendrait équilibrer son univers. Lentement, la poussière devint bulbe, les bulbes devinrent fleurs et les fleurs devinrent...
Zhumains
Les Zhumains étaient des créatures composées de chaire, d’os et d’eau. Comme la terre, le bois et les rivières. Ils portaient en eux un cœur vibrant comme le feu et un esprit léger comme l’air. Ils étaient la Forêt, à part entière.
Mais, une chose les différenciait du reste des habitants de l'endroit : leurs parts d’ombre. Ils avaient autrefois été ravageurs, aujourd’hui en paix et en harmonie avec leur environnement. Ils comprenaient désormais que la Forêt était indispensable à leur survie, mais qu’elle ne survivrait que grâce à eux. Un parfait équilibre, une entente tacite de laquelle les deux parties n’en tirent que le meilleur.
Les Zhumains étaient aussi des êtres d’émotions. Ils savaient vivre la colère, la peine, et ces humeurs teintaient le quotidien, faisaient pleuvoir la pluie, neiger la neige et couvrir le ciel. Mais leur joie, leurs rires, faisaient rayonner le soleil, scintiller les étoiles et briller les arcs-en-ciel. Et grâce à eux, l’équilibre s’installa et perdura jusqu’à la fin des temps.
Toute une belle grande histoire réaliste!🌱🪴🌳🐱🐴💆💚